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Depuis le début des années 80, l’assistance sexuelle aux personnes handicapées est une activité légale aux Pays-Bas. Ont suivi le Danemark, l’Allemagne, les Etats-Unis… mais pas la France qui, malgré de nombreux débats, continue d’assimiler cette pratique à la prostitution.

Qu’en disent les principaux concernés ?
L’année dernière, Libération réalisait une série de témoignages d’assistants et de personnes en situation de handicap. Tous n’y étaient pas favorables : « L’idée même de fournir un service spécialisé, c’est reconnaître que les corps handicapés ne feront jamais envie ! Qu’ils ne peuvent pas plaire. Le préjugé n’est pas de dire que les personnes handicapées n’ont pas de sexualité, mais de considérer qu’elles sont condamnées à désirer. Que le plaisir de faire l’amour ne serait pas partagé ! Moi, j’affirme que le seul besoin que nous avons, c’est, valides ou pas, d’avoir l’opportunité de se reconnaître dans le regard de l’autre, de se rencontrer (…) Il faut que les établissements soient plus ouverts, que l’on permette d’y accueillir des personnes de l’extérieur et qu’elles puissent y dormir. Que les personnes en situation de handicap vivant chez elles bénéficient d’aides pour ne pas rester cloîtrées et puissent accéder à la vie en commun et aux rencontres. »

D’autres au contraire considéraient l’assistanat sexuel comme leur seule chance de connaître une expérience érotique… avec les risques que cela comporte : «M’attacher, c’est ce qui me fait le plus peur. Quand on est tellement en manque affectif comme moi… Si je suis claire dans ma tête, je peux sans doute faire en sorte de ne pas trop souffrir par la suite. C’est un risque que j’accepte. La société a tendance à vouloir surprotéger les personnes vulnérables. »

Surprotéger et infantiliser, à la manière des personnes âgées… Mais quels que soient les risques, il semble de plus en plus difficile de justifier cette interdiction. Pour citer Pascal Ribes, vice-présidente de l’Association des paralysés de France et du Collectif handicaps et sexualité : « On ne peut pas dire « tant pis pour vous » à une personne qui a une atrophie des membres supérieurs et ne peut pas se toucher ! On ne peut pas dire « tant pis pour vous » à un couple de personnes en situation de handicap qui ne peut pas avoir de rapport sexuel sans aide humaine ! On ne peut pas dire « tant pis pour vous » à quelqu’un qui vous dit « Je ne veux pas mourir sans avoir fait l’amour une fois dans ma vie »! »

En l’absence de cadre légal, des particuliers prennent les devants : des stages de formation à l’assistanat sexuel réunissent depuis 2015 en Alsace plusieurs dizaines de participants. Les profils sont incroyablement divers : un masseur de 74 ans, un magnétiseur cinquantenaire, une étudiante en psychologie… La formation en elle-même n’est pas illégale : tant qu’il n’y a pas de rémunération à la clef, n’importe quelle personne handicapée hospitalisée est libre d’avoir des rapports sexuels avec qui bon lui chante… en théorie. En très grande théorie. Car la sexualité des personnes handicapées continue de susciter chez beaucoup un malaise confus.

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C’est cette question qu’aborde le documentaire espagnol « Yes, we Fuck« . Un de ses auteurs, Antonio Centeno, expliquait en 2015 à Daze : « in Spain, we have a motto which roughly translates as ‘Fuck as you live, and live as you fuck’. Which means that you can only have your own independent life if you have a sex life which is free, which is independent, which is rich. And you can only have a sex life that is free if you personally are free. If you have a free sex life, you can have a good life. You can fight for your freedom, for your independence. So the film is about how you can show, through sexuality, that people with functional diversity want to live like others, independently, not being cancelled out and made to delegate their decisions through family members or professionals. »

Le corps et le plaisir, et leur place dans nos société, sont également le point de départ d’Olivier Fermariello, dont les photographies font l’effet de boulets de canon. Impossible de rester indifférent face à ces corps « autres », difficile de ne pas s’interroger sur la manière dont ils vivent le plaisir… dans une culture médiatique où quelques kilos, quelques poils en trop, suffisent à vous disqualifier.

 

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***EXCLUSIVE*** MODENA, ITALY – 2013: Chiara and Fabio have been together for four years in Modena, Italy. INTIMATE portraits of individuals with debilitating conditions question the notion of beauty. Oliver Fermariello, 39, from Rome, Italy, uses his project ëJe tíaime moi aussií ñ which translates to ëI love you tooí ñ to explore the sexual identity of people who live with disabilities. The photographer lets his subjects be free in their own home, capturing intimate moments between their partners, while theyíre getting dressed or brushing their teeth. PHOTOGRAPH BY Olivier Fermariello / Barcroft Media UK Office, London. T +44 845 370 2233 W http://www.barcroftmedia.com USA Office, New York City. T +1 212 796 2458 W http://www.barcroftusa.com Indian Office, Delhi. T +91 11 4053 2429 W http://www.barcroftindia.com